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Paul McCartney – Maybe I'm Amazed : la déclaration d’amour qui a changé la donne



1970 : quand les Beatles sont proches de se briser en plein vol, Paul McCartney, lui, rentre chez lui. Littéralement. Il s’isole dans sa ferme écossaise avec Linda, branche un micro dans son salon, et recommence à zéro. C’est dans ce cocon que naît McCartney, un album brut et personnel, loin des grandes productions des Fab Four. Au cœur de ce disque intime, une chanson s’impose, certainement ma préférée de McCartney en solo : Maybe I'm Amazed. Pas un tube calibré, mais un monument émotionnel.


McCartney : un album maison, un album cocon


Pendant que John Lennon fait la révolution avec Yoko, Paul, lui, panse ses plaies dans la ferme écossaise qu'il partage avec Linda. L'ambiance n'est pas franchement à la fête : procès avec ses ex-camarades, crise existentielle, peur du vide. Le tout arrosé d'un peu trop de whisky.


Dans ce contexte, l'album McCartney naît d'une urgence intime : recréer quelque chose de simple, d'authentique, loin du tumulte médiatique. Un disque "fait maison" au sens le plus littéral : Paul joue de tous les instruments, de la batterie à la guitare en passant par le piano, tandis que Linda ajoute quelques chœurs.


Pas de plan marketing, pas d'ingénieur du son star. Juste un homme, une femme, un enregistreur Studer, et une envie folle de recommencer à zéro.


Maybe I'm Amazed" : une lettre d’amour sous haute tension


Parmi les petits trésors un peu bruts de McCartney, un morceau brille d'une intensité différente : Maybe I'm Amazed. C'est LA chanson qui semble avoir canalisé toute la douleur, l'amour et l'espoir du moment.


Écrite en 1969, alors que les Beatles sont en pleine implosion, la chanson est dédiée à Linda, sans qui, selon Paul, il n’aurait "peut-être pas survécu à tout ça". À travers ses paroles, Paul se livre avec une vulnérabilité rare : entre l’admiration éperdue ("Baby, I’m amazed at the way you love me all the time") et la peur panique d’aimer ("Maybe I’m afraid of the way I love you").


Le tout porté par une interprétation vocale d’une intensité quasi animale : Paul crie son amour, avec cette montée d'adrénaline qui donne encore aujourd'hui des frissons.

 

Un enregistrement à l’arrache mais inspiré


Contrairement au reste de l'album, bricolé entre la cuisine et la chambre d'amis, Maybe I'm Amazed est enregistré aux studios Abbey Road, dans le mythique Studio 2, le 15 février 1970. Pas de George Martin à la baguette cette fois-ci, mais un McCartney en mode one-man band, jouant absolument toutes les parties instrumentales.


Malgré l'ampleur émotionnelle du morceau, Paul refuse obstinément d’en faire un single à sa sortie. Trop personnel, peut-être. Trop tôt, sûrement.


Musicalement, la chanson est bien plus sophistiquée qu’elle n’en a l’air. On y trouve un solo de guitare déchirant (à 1:13 puis à 3:07), un motif de piano en progression chromatique entre les couplets, et surtout une des intros les plus reconnaissables de McCartney, avec ce fondu enchaîné qui semble couper la première mesure, comme pour souligner la montée en intensité.


Un succès retardé mais inévitable


À défaut de single officiel, Maybe I'm Amazed se fraie quand même un chemin à la radio, soutenue par un clip minimaliste : un diaporama de photos de la petite famille McCartney, diffusé lors d’une émission télé le 19 avril 1970. Résultat : le morceau devient un favori des fans, un classique de concert, un titre culte sans même passer par la case marketing.



Et puis, en 1977, la version live avec son nouveau groupe Wings, issue de l’album Wings Over America, remet la chanson sous les projecteurs. Cette fois, pas de faux départ : la chanson grimpe dans les charts américains (#10 au Billboard Hot 100) et devient ce qu’elle aurait toujours dû être : un tube.


Un écho chez les autres, y compris Lennon


Maybe I’m Amazed est immédiatement saluée par la critique : Rolling Stone y voit "la seule chanson du disque qui égale les meilleures compositions de Paul". Melody Maker affirme qu’elle aurait été un classique si elle avait figuré sur Abbey Road. Même Lennon ne cache pas son admiration : lors d’une interview en 1972, il en fredonne un couplet, à sa façon.


La chanson est aussi reprise par de nombreux artistes, séduits par ses possibilités vocales : Sandie Shaw, les Faces (avec Rod Stewart), Petula Clark, Carleen Anderson (dont la version de 1998 atteindra le #26 au Royaume-Uni)…


Une chanson à part, un instant suspendu


Ce qui rend Maybe I’m Amazed si unique, ce n’est pas sa popularité – moins universelle qu’un Imagine ou My Sweet Lord – mais sa vérité crue. McCartney l’a dit lui-même :

"C’est peut-être la chanson que je voudrais qu’on retienne de moi."


Pas étonnant que Rolling Stone ait classé la chanson parmi les 500 meilleures de tous les temps. Et pas étonnant non plus qu’à 80 ans passés, Paul continue de la chanter comme si sa vie en dépendait.


Peut-être qu’en fait, c’est toujours un peu le cas.


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