I Just Don't Know What to Do with Myself : quand Dusty Springfield transforme une pépite oubliée en diamant pop
- L'Agent Secret des Chansons
- 18 févr.
- 3 min de lecture

Ah, l’angoisse douce-amère de ne pas savoir quoi faire de soi-même... Aujourd’hui, dans L’agent secret des chansons, je vous embarque (pour une fois) dans un petit voyage au cœur d'un tube : I Just Don’t Know What to Do with Myself, interprétée comme personne par Dusty Springfield. Accrochez-vous : ça tourbillonne entre le génie de Burt Bacharach, la voix de velours de Dusty, et un petit détour par la version frenchie moins connue de Sheila.
Une chanson signée Bacharach et David... mais pas pour Dusty au départ
Écrite par le duo magique Burt Bacharach et Hal David, la chanson est d'abord confiée à Tommy Hunt en 1962. Avec Bacharach à la baguette et les légendaires Jerry Leiber et Mike Stoller à la production, on aurait pu croire le succès assuré. Et pourtant, rien : le morceau se noie dans l’océan sans fond des singles oubliés, sans même frôler le Billboard Hot 100.
Mais parfois, un échec devient une bénédiction. Deux ans plus tard, lors d’un passage à New York, Burt Bacharach fait écouter la version de Hunt à Dusty Springfield. Coup de foudre musical immédiat : Dusty décide de ressusciter la chanson.
Dusty Springfield : de l’hésitation au sommet des charts
Dusty enregistre sa version au mythique Olympic Studios de Londres. Pourtant, fidèle à ses doutes, elle tente de convaincre son manager de ne pas sortir le titre. Trop tard ! Le disque paraît le 26 juin 1964, et grimpe en quelques semaines jusqu'à la 3ᵉ place des charts britanniques, juste derrière les Beatles et les Rolling Stones. Il y a pire comme concurrence…
Son interprétation transcende l'originale : plus dramatique, plus orchestrale, grâce aux arrangements somptueux d'Ivor Raymonde (violons tourbillonnants, batterie percutante, cuivres suspendus). Dusty injecte à la chanson une intensité émotionnelle rare.
Le plus beau ? Même Burt Bacharach reconnaît que Dusty a surpassé la version d’origine.
Dusty Springfield et Burt Bacharach : une histoire d’amour musicale
I Just Don’t Know What to Do with Myself marque le début d'une vraie idylle artistique entre Dusty et le tandem Bacharach/David. Au total, elle enregistrera officiellement huit chansons écrites par eux, dont Wishin' and Hopin', The Look of Love et Anyone Who Had a Heart.
Dusty ne se contente pas d’interpréter : elle habite littéralement ces chansons, y insufflant sa fragilité, sa force, ses fêlures. Bacharach dira aussi d’elle qu’elle "écoute avec les oreilles d’un arrangeur" — un compliment rare. Et pour une fois, Dusty grille même la politesse à Dionne Warwick, qui enregistrera sa version d’I Just Don’t Know What to Do with Myself... en 1966, deux ans après elle.
La version française : Sheila entre en scène
Mais l’histoire ne s’arrête pas là ! Comme souvent dans les années 60, le succès anglais de Dusty inspire une adaptation française. Sheila s’empare du morceau et enregistre Oui, il faut croire, adapté par Claude Carrère et Michèle Vendôme. Sortie en face B de son 7ᵉ 45 tours (Écoute ce disque / Vous les copains), la chanson bénéficie du triomphe commercial du disque, écoulé à plus de 500 000 exemplaires. Si Oui, il faut croire n'a pas été défendu à la télévision, Sheila en livre une version studio sincère et soignée. Fun fact : Michèle Vendôme avait déjà signé l’adaptation d'une autre chanson de Bacharach pour Sheila quelques mois plus tôt (Chaque instant de chaque jour), un petit bijou dans sa discographie.
Une chanson éternelle, de Dusty Springfield aux White Stripes
I Just Don’t Know What to Do with Myself est de ces chansons-miracles où tout s’emboîte : mélodie poignante, production somptueuse et une interprète au sommet de son art. Encore aujourd'hui, elle continue d’intéresser toutes les générations.
Preuve de son intemporalité : en 2003, le groupe américain The White Stripes livre sa propre version du morceau sur l'album Elephant. Rugueuse et nerveuse, leur reprise grimpe dans le Top 40 en Nouvelle-Zélande, au Royaume-Uni et aux États-Unis. Le clip, réalisé en noir et blanc par Sofia Coppola, avec Kate Moss en pole-danseuse féline, devient instantanément iconique.
Alors, que ce soit la voix brisée de Dusty, la fraîcheur de Sheila ou la tension électrique des White Stripes, une chose est sûre : on n'a pas fini d'aimer ne pas savoir quoi faire de soi-même.
Sheila chante Oui, Il Faut Croire
The White Stripes : clip de I Just Don't Know What To Do With Myself
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