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Native New Yorker – Odyssey : disco, taxis et solitude au coin de la 5e Avenue


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On l’oublie parfois, mais le disco, en plus d’être une fête sous les lumières des discothèques, c’était aussi une mélancolie pailletée, un spleen en robe lamée. La preuve ? Native New Yorker, petit chef-d’œuvre d’Odyssey, sorti en 1977, qui balance entre piano jazzy et sax lascif sur fond de rues pleines de bruit, de néons… et de désillusions.


C’est l’histoire d’une fille. Une nana de New York, « la ville qui ne dort jamais », capitale du disco avec ses cinq cents discothèques. Elle court dans Manhattan comme dans une scène de Saturday Night Fever, mais sans Travolta pour la rattraper. Elle a grandi entre Harlem et Broadway, connaît les lignes de métro mieux que ses ex, et sait que l’amour, dans cette ville, ne prend pas toujours le temps de s’arrêter. Bref, elle est une native New Yorker – et elle en bave.


Flashback : Frankie, les Four Seasons et un plan B génial


À l’origine, Native New Yorker, ce tube un peu oublié ici à présent, n’était même pas destinée à Odyssey. C’est Frankie Valli, la voix mythique des Four Seasons (qu’on remercie pour Grease), qui enregistre le morceau en premier cette année-là, sur son album Lady Put the Light Out. Le titre, écrit par Sandy Linzer et Denny Randell, est alors produit par Charlie Calello, fidèle compagnon des Four Seasons. Résultat ? Une jolie ballade jazz-pop, mais qui passe inaperçue.

La version ne fait pas d’étincelles. Mais persuadé du potentiel de la chanson, Calello recycle l’idée, repeint la carrosserie en disco, et confie la clef du bolide à un tout nouveau trio vocal, inconnu au bataillon : Odyssey.


Odyssey, la famille disco improvisée


Chez Odyssey, à la base, on a trois sœurs : Lillian, Louise et Carmen Lopez, originaires du Bronx via Porto Rico. Carmen quitte vite le navire, et le trio devient un duo. On leur ajoute Tony Reynolds, chanteur/bassiste d’origine philippine, qui va donner au groupe son groove irrésistible. Voilà, le cocktail est prêt. Il ne manque qu’un shaker : ce sera Native New Yorker, leur premier titre.


Et là, tout colle. La voix lead de Lillian, à la fois douce et assurée, flotte au-dessus d’un arrangement qui sent le samedi soir : cordes en cascade, cuivre clinquant, saxophone signé Michael Brecker. Calello peaufine chaque détail.


New York, New York… mais pas version carte postale


Car sous le strass, il y a le stress. La chanson, mine de rien, en dit long sur les désillusions new-yorkaises. Ici, pas de rêve américain qui finit bien. Juste une fille qui “devrait connaître la partition par cœur” mais qui continue de croire, comme une héroïne de comédie romantique ratée, que l’amour pourrait débarquer à Times Square.

Love is just a passing word”, dit le texte. Traduction libre : l’amour, c’est un concept abandonné entre deux stations de métro. Et comme le dit la chanson : “No one opens the door for a native New Yorker.” Autrement dit : tu peux sonner, personne ne t’ouvrira.



Un succès immédiat… mais surtout à l’export


Contre toute attente, la version d’Odyssey cartonne. Native New Yorker grimpe à la 21e place du Billboard Hot 100, atteint le top 5 au Royaume-Uni, et devient un classique instantané des clubs. C’est le début d’une belle période pour le groupe. En 1980, ils enchaînent avec Use It Up and Wear It Out (n°1 en Angleterre, totalement ignoré aux USA), puis If You’re Lookin’ for a Way Out et Going Back to My Roots, reprise de Lamont Dozier (et gros tube en France). Leur disco est toujours classe, jamais racoleur.


Mais les choses bougent. Tony Reynolds quitte le groupe après le 1er album sans qu’on sache très bien pourquoi. Il est remplacé par Bill McEachern. Au fil du temps, des départs et des tournées, c’est Steven Collazo, le fils de Lillian, qui reprend le flambeau. Et Odyssey continue, encore aujourd’hui, de faire vibrer les scènes anglaises.


Un classique discret, mais immortel


Native New Yorker, malgré sa touche mélancolique, reste l’un des morceaux les plus aimés des New-Yorkais. Repris par Esther Phillips (version jazz) ou Black Box (version dance), entendu dans Pose, Spider-Man: No Way Home ou même The Masked Singer, il s’est glissé dans la culture pop sans jamais perdre son élégance. Il retentit encore à la fin des matchs du New York City FC, comme une signature musicale de la ville.


Parce qu’au fond, cette chanson, c’est New York tout craché : brillante, arrogante, amoureuse et paumée. C’est l’histoire d’une ville où tout le monde cherche quelque chose, et où personne n’ouvre la porte. Mais parfois, ça suffit pour danser jusqu’au bout de la nuit.


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Ringard Willycat
03 août
Noté 5 étoiles sur 5.
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