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Les Papillons de Sheila : trip psyché ou comptine innocente ?



Sheila et les années 60, c'est un peu comme une boîte de bonbons : parfois, on tombe sur un goût familier et trop sucré, et parfois, on est surpris par une saveur plus relevée. Et parmi ces curiosités musicales, il y a Les Papillons. Une chanson qui m’a toujours semblé plus punchy et plus pop que d’autres titres de Sheila, avec une production soignée et des paroles qui, disons-le franchement, sortent un peu de nulle part. Alors, chef-d’œuvre sous-estimé ou bizarrerie psychédélique ? Décryptage.


Un titre de Charden qui en a sous l’aile


Sortie en 1967, après son gros succès d'été Adios Amor, Les Papillons se retrouve accolé à un titre bien plus identifié du grand public : Le Kilt. Là où Le Kilt joue la carte du folklore mignon avec ses cornemuses et son rythme presque militaire, Les Papillons part dans une toute autre direction. On est sur un morceau au tempo plus angoissant et à l’ambiance bien plus bizarre.


Derrière la musique, on retrouve Monty et Éric Charden, deux noms bien connus de la chanson française de l'époque. Charden, en particulier, vient de créer pour lui son plus grand succès Le Monde est gris, le monde est bleu. Il signe avec Les papillons une compo qui pourrait presque passer pour un morceau pop anglais, avec ses violons et ses cuivres qui lui donnent une ambiance particulière.


Un texte… étrange ?


Bon, soyons honnêtes, niveau paroles (la team Jacques Plante / Claude Carrère), on est sur quelque chose d’assez étrange. Déjà, ce Attention ! Papillons o-ons o-ons o-ons lancé comme une alerte à la population. Depuis quand les papillons sont-ils une menace ? Surtout quand la chanteuse précise qu’ils sont « le symbole de la vie calme et du bonheur »…


Bien sûr, on peut tout à fait prendre cette chanson au premier degré : une balade onirique où des papillons virevoltent dans un rêve enchanté. Mais 1967, c’est aussi l’année du Sgt. Pepper’s des Beatles, des expérimentations psychédéliques, et des doubles lectures à la Gainsbourg dans les chansons populaires. Alors, faut-il y voir une métaphore d’un trip hallucinogène ? Je ne pense pas que les paroliers aient voulu insinuer ça, mais il faut avouer que cette ambiance légèrement hypnotique et cette mélodie entêtante laissent songeur.


Une production qui sort du lot


Un autre point qui m’a toujours frappé avec Les Papillons, c’est la qualité de la production. Ici, les arrangements sont soignés, le rythme est dynamique et on sent une vraie volonté de faire un titre pop efficace. Jean-Claude Petit, qui arrange le morceau, lui donne une ampleur assez moderne en phase avec l’époque.


C’est d’autant plus flagrant quand on compare avec Le Kilt, qui, soyons honnêtes, est un peu bourrin dans son rythme martial. Là où Le Kilt mise tout sur l’aspect folklorique, Les Papillons joue une carte plus pop.


Une promo fantôme


Le 45 tours se vend à près de 300 000 exemplaires, porté par les succès du titre principal et de sa face B Dans une heure. Mais Les Papillons ne bénéficie pas de la même promo. À la télévision, une seule prestation : Télé-Dimanche et aucune mise en avant particulière.


Plus tard, Les Papillons atterrit dans la compilation Sheila chante pour les enfants, aux côtés de titres aussi subversifs que Arlequin ou L’Âne, le Bœuf et le Petit Mouton (on a connu des associations plus rock’n’roll). Une belle manière d’achever de classer la chanson au rayon des bluettes inoffensives.


Alors, on en pense quoi aujourd’hui ?


Avec le recul, Les Papillons reste une chanson anecdotique mais assez unique dans la discographie de Sheila. Elle a une pêche qu’on ne retrouve pas dans tous ses titres, une production plus pop que la moyenne, et un texte qui sort des sentiers battus. Son manque de succès n’est pas totalement incompréhensible, mais c’est dommage.


Et puis, avouons-le, une Sheila qui nous alerte sur une menace papillonnesque, ça a quelque chose de délicieusement absurde. Moi, j’achète.


Attention ! Papillons o-ons o-ons o-ons !




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