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It’s a Cryin’ Shame ou la soul oubliée de Gayle McCormick



Je me souviens parfaitement du jour où j'ai découvert It's a Cryin' Shame. Je chinais aux puces pour ma collection de vinyles quand je suis tombé sur la pochette du premier album solo de Gayle McCormick. Je me suis dit : "Tiens, on va voir ce qu'elle valait sans Smith."

Dès le premier morceau, j'ai su que j'avais mis la main sur un petit trésor oublié. It's a Cryin' Shame, c'est un titre à la fois dansant et mélancolique, tout ce que j’aime. C’est catchy, direct, et ça vous attrape pour ne plus vous lâcher.


Une chanson au cœur battant de Northern Soul


Écrite par Dennis Lambert et Brian Potter – à qui l’on doit des tubes pour les Four Tops comme Ain’t No Woman (Like the One I’ve Got) – la chanson porte la marque de ce duo : un sens mélodique imparable et un refrain qui reste dans la tête.


Musicalement, c'est du pur Northern Soul : tempo rapide, ligne de basse dansante, voix pleine de ferveur. On y retrouve les meilleurs musiciens de session de la côte ouest. La machine est bien huilée et propulse la voix de McCormick.

Et quelle voix. Ce qui distingue cette version des autres – car la chanson a été reprise par The Grass Roots ou encore Cher – c’est la justesse émotionnelle. McCormick s’approprie totalement la chanson. Là où Cher reste étonnamment neutre, elle, trouve le ton juste. Au moment du changement de tonalité dans le troisième couplet, quelque chose craque, l’émotion affleure. Et c’est précisément ce qui fait de cette version la version définitive, comme le note un internaute avec justesse : "Dang-it she was good!"



Le morceau a pourtant peiné à décoller dans les charts, plafonnant à la 44e place du Billboard Hot 100. Mais il a trouvé une seconde vie sur les pistes de danse du nord de l'Angleterre, où les passionnés de Northern Soul en ont fait un hymne nocturne plusieurs années après.


Premier album solo pour McCormick


Sorti en 1971, l’album Gayle McCormick est un disque curieux, patchwork d’influences pop, rock et soul. En plus de It's a Cryin' Shame, l'album comprend des reprises : une version vibrante de Superstar (celle que les Carpenters rendront célèbre) et une relecture fiévreuse de A Natural Woman d’Aretha. La voix de McCormick s'y montre tour à tour veloutée et rugueuse.


Gayle McCormick : une voix, une mémoire


Avant sa carrière solo, McCormick était la voix détonante du groupe Smith, qui a cartonné en 1969 avec sa version musclée de Baby It’s You. Née à St. Louis en 1948, elle commence par chanter dans des chorales avant de s’essayer au rock et à la soul dans les années 60. Elle passe par quelques groupes, dont Steve Cummings and The Klassmen, avant de rejoindre Smith. Une fois le groupe dissous, elle tente l'aventure en solo avec courage, même si les ventes ne suivent pas. Trois albums, quelques singles, puis un retrait progressif. McCormick se marie, part vivre à Hawaï, revient à St. Louis, et s'éloigne du showbiz. Elle s'éteint en 2016.


Northern Soul : un amour transatlantique


Mais alors, pourquoi It's a Cryin' Shame continue-t-elle de résonner ? Parce que cette chanson a été adoptée par le mouvement Northern Soul. Né dans les années 60 dans les clubs du nord de l’Angleterre, ce courant passionné de soul américaine délaissée par son propre pays a redonné vie à des titres passés inaperçus aux États-Unis. It's a Cryin' Shame en fait partie. Ce morceau avait tout pour plaire aux amateurs du genre : rythme rapide, énergie brute, et surtout cette voix qui donne envie de sauter sur la piste.


Conclusion : ne laissons pas l’oubli gagner


Gayle McCormick est l’une de ces artistes que le temps a eu tendance à oublier. Pourtant, sa voix, ses choix musicaux et son authenticité méritent d’être remis en lumière. Alors, la prochaine fois que vous tombez sur son nom, ne passez pas votre chemin. Posez le saphir, lancez le morceau. Et laissez-vous emporter. Ce serait vraiment dommage de rater ça. Un vrai crying shame, en somme.



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